Lucile — Olivier Boivinet

Je vous informais, il y a peu, de l’exposition de gravures d’Olivier Boivinet organisée par  l’association Sténopé. Je dois reconnaître que j’ai beaucoup apprécié cette exposition —  une première dans une galerie pour ce jeune graveur qui est l’élève de mon ami François Robert – et j’ai décidé de me fendre d’un petit billet à son propos.

J’ai aimé ce travail : méticuleux et en même temps sans cesse en quête de ce qui échappe à l’artiste, une recherche de hasards, d’itinérances (le titre de l’exposition dit bien simultanément cet itinéraire comme un chemin tracé et choisi par avance et en même temps l’errance induite par  ces voyages qui sont autant d’histoires illustrant un carnet de voyage imaginaire — ou pas). Si on peut y voir un côté « étude », avec des déclinaisons d’un même sujet avec des techniques différentes : linogravure, pointe sèche, monotype, collagravure… c’est pour mieux renforcer l’idée d’itinérances et de carnets de voyage dont je parlais plus haut. Carnets pas si imaginaires que cela puisqu’Olivier s’inspire d’albums de photographie et de carnets de sa propre famille datant du XIXe, début XXe ((cf. l’entretien avec Olivier Boivinet sur le site de Sténopé)).

Mais il y avait un autre versant à l’exposition, une face cachée visible seulement en présence de l’artiste, lorsque celui-ci guide le voyageur égaré ou curieux dans cette ravissante galerie.  En effet, en prenant rendez-vous avec l’artiste, dans un quasi face-à-face inédit, le curieux avait la possibilité de découvrir certaines de ses gravures en présence de textes et de musique, écrits et composée par l’auteur. La visite prend alors une tournure toute différente et l’itinérance se voit définitivement attribuée un deuxième « r ». Ainsi, on se retrouve assis dans un fauteuil confortable, face à la gravure — visages interrogeant le spectateur, posture hiératique posant pour la postérité, paysages filaires sous des torrents de pluie, cargo naufragé dans un cimetière métallique –, un texte dans la main et une bande son dans les oreilles…

Non ce n’est pas du cinéma, non ce n’est pas de la bande dessinée (quand bien même j’ai trouvé des traits communs entre certaines gravures et l’univers Corto maltésien d’Hugo Pratt, ou même selon les dires de l’artiste avec Philémon de Fred), c’est la croisée de trois histoires qui se s’entrelacent, s’enrichissent, se détournent mutuellement. Au final un relief insoupçonnable naît de cette rencontre. Et l’on apprend par la suite que la genèse de chaque œuvre a son cheminement propre, des résonances sans ordre pré-établi : ainsi une gravure naît d’un texte et enfante une musique tandis qu’une autre gravure suit le chemin inverse et qu’une autre à un itinéraire encore autre. Inspiration poly-sémique/chromique/phonique qui tisse une trame complexe pour un résultat très convaincant.

Ce travail touchant à une sorte d’art total (j’ai omis volontairement de parler du dispositif tridimensionnel qui présentait les œuvres), j’ai pensé qu’il pourrait être mis en valeur – tout du moins pas trop trahi – dans une vidéo associant image, texte et bande son. J’ai ressorti alors mon logiciel favori de montage et ai créé – avec l’aimable autorisation de l’auteur – ces deux vidéos ci-dessous. La première, Lucile, dont je suis très fier d’avoir un tirage dans mon salon, raconte l’histoire d’une image inscrite dans une crypte où se déroule un étrange rituel. La seconde, Saison des âmes errantes, est une série intitulée globalement « Les tisserands d’eau » et narre la détermination, l’absurdité réitérée des hommes luttant contre la mousson.

Lucile

La saison des âmes errantes

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