Marie-Christine m’a proposé en échange la photo d’« Une grue prise sur une plage de l’Atlantique en Vendée un jour où j’étais seule sur la plage et qui prenait tout son temps pour débusquer des crabes dans les rochers. » J’étais parti sur un texte long, un peu à la manière de Vaches de Frédéric Boyer, mais finalement, au dernier moment, j’ai changé de proposition en écrivant un calligramme sur la grue. Vous trouverez mon texte sur le blog de Marie-Christine.
Pour découvrir et comprendre le principe des vases communicants, je vous invite à lire le « Ne pas écrire pour, mais écrire chez l’autre » sur www.liminaire.fr.
Ici la liste complète des vases communicants.
Dernier Vol
Cette journée n’en finit plus.
Ce fut la plus longue de ma courte vie, la plus importante aussi.
J’ai accompli mon destin, ce pour quoi l’on m’avait fait éclore.
Nous étions dix et j’ai gagné la course vers le soleil d’or.
Il fallait voler à la verticale, de plus en plus vite, jusqu’à ce que nos ailes se brisent. Il fallait La rejoindre au plus près du soleil et se fondre en elle pour que le miracle s’accomplisse.
J’ai réussi. Je fus le plus fort, le plus vigoureux, le plus résistant, le plus rapide.
J’ai donné toutes mes forces dans la bataille et toute la ruche se souviendra de mon courage.
Mais mes ailes n’ont pas résisté, je les ai entendu se déchirer dans une plainte de soie. Puis je suis tombé sur le rebord de ce balcon.
J’ai gagné le droit de me reposer un peu dans le soleil couchant.
Je sais que ce soir est le dernier où je verrai la lumière enflammer l’horizon.
C’était court finalement, quelques semaines, juste le temps qu’il fallait pour aimer cet endroit, pour goûter aux trésors sucrés de cette prairie.
J’aurais aimé aller visiter le pays qui s’étire au delà des blés, là-bas derrière la forêt. J’ai senti des parfums inconnus apportés par la brise du matin en suivant les papillons des pins.
Mais je crois que je n’aurai pas le temps.
Qui sait, dans une saison lointaine, si les fées de la prairie me donnent une seconde chance, je reviendrai peut-être goûter leurs blés dorés…
Le vol du bourdon a toujours une fin (c’est aussi ce que nous apprend la musique)…
@ mchristinegrimard : N’ayant pas vu, lors de ma première lecture, la rubrique « commentaire », j’ai dû penser qu’il n’y en avait pas…
Le texte bourdonnant encadre joliment l’insecte et lui fait une sorte d’écrin en forme presque tombale.